L’Alsace se met au vrac
On s’emballe !
Consommer autrement, faire attention à sa santé et à l’environnement sont devenus pour nombre d’entre nous des évidences. Pourtant, si certaines pratiques comme le choix d’une alimentation raisonnée, bio ou locale se démocratisent, d’autres sont encore peu connues ou parfois jugées trop contraignantes. C’est le cas notamment des courses dites “en vrac”, qui ne touchent encore qu’une minorité de consommateurs avertis. Écolo, gourou de la nature ou simple néophyte curieux et soucieux des questions durables, vous trouverez dans ce dossier tout ce qu’il faut savoir sur ce nouveau mode de consommation, ses pratiques, ses lieux-clés, ses avantages et inconvénients et surtout les enjeux que suscite son développement.

Le vrac, pourquoi ?
Saviez-vous qu’un Strasbourgeois produit en moyenne 252,9 kg d’ordures ménagères chaque année ? C’est le lourd bilan dressé au mois d’avril par l’Eurométropole, qui cherche désormais à accentuer ses politiques environnementales et son programme de sensibilisation auprès des citoyens. Pourquoi ? Parce que le taux de pollution de l’air explose, que la gestion des déchets est extrêmement coûteuse et complexe et que, surtout, c’est l’un des sujets qui intéressent le plus les habitants (d’après l’enquête réalisée par le Conseil de développement de l’Eurométropole en automne 2017).
Mais à qui la faute ? La question a le mérite d’être posée. Il est aujourd’hui presque impossible pour un consommateur lambda d’échapper aux conditionnements des produits qu’il achète et qui encombrent inévitablement les poubelles. Pourtant, certaines entreprises ont su faire du zéro déchet le fer de lance de leur développement économique. C’est le cas du commerce en vrac, qui voit le nombre de ses boutiques spécialisées se multiplier dans la région.
Les principes et les pratiques
L’épicerie en vrac repose sur trois grands principes : moins de gaspillage, moins d’emballages, et théoriquement plus d’économies. Les produits, pour la plupart secs, sont vendus au poids, ce qui permet au consommateur de n’acheter que la quantité dont il a besoin. En apportant ses propres contenants (bocaux en verre ou en métal, bouteilles, sacs en tissus, etc.), il limite aussi les déchets plastiques liés aux emballages.
La plupart des épiceries spécialisées proposent des produits secs, ou de longue conservation, issus d’une production éthique et qui colle au concept (bio, local ou raisonné). Il suffit de lire les étiquettes et de se renseigner pour en connaître la marque et la provenance.
Où acheter en vrac ?
Plusieurs épiceries entièrement spécialisées dans le vrac ont ouvert récemment à Strasbourg et dans les environs.
Be vrac
La petite dernière, située à Cronenbourg, n’a que quelques semaines. Cette boutique indépendante propose des produits locaux, mais aussi toute une gamme d’accessoires en matériaux “clean” et destinés au mode de vie zéro déchet. On y trouve des produits frais et végans (fromages végétaux, tofu), du pain mais aussi des paniers de légumes sur commande en provenance de la ferme Herrmann. Première épicerie du genre dans le quartier, elle relance le commerce de proximité de manière responsable.



Day by Day
On peut citer la boutique Day by Day, première à s’être lancée dans l’aventure strasbourgeoise il y a deux ans. Cette enseigne franchisée française propose des produits alimentaires secs, mais aussi des huiles, des vinaigres, des olives ainsi que des produits d’entretien, d’hygiène et même d’alimentation animale. Pour répondre au pilier social du développement durable, la marque s’engage à mettre en place des partenariats à long terme avec les producteurs tout en faisant de l’information au consommateur une priorité. L’enseigne est aujourd’hui leader sur le marché français et son patron est également à la tête de l’association “Réseau vrac”, dont le but est de porter des projets à l’échelle nationale et d’aider l’installation des boutiques indépendantes.



Le Bocal
Nichée à la Krutenau, cette petite boutique vient de fêter sa première année. En plus des produits secs et d’entretien, on y trouve quelques produits frais, comme des fruits et des légumes, des herbes aromatiques ainsi que des produits locaux selon les arrivages et les saisons. Le choix est moins important, mais les produits sont de qualité et souvent originaux. On peut par exemple y découvrir des marques strasbourgeoises comme Muesli & Smile, Omnino (une micro-brûlerie strasbourgeoise) ou des produits de l’Atelier des Fines bouches.



Tootopoids
Petit ovni dans le monde des épiceries en vrac, Tootopoids n’est pas une boutique mais le premier food truck zéro déchet d’Alsace. Actrice très engagée du zéro déchet, Virginie Renard et son camion “Tom” sillonnent l’Alsace pour faire découvrir les produits et le concept. Apéritifs, céréales, graines, légumineuses, pâtes, riz, huiles, épices ou produits d’entretien, on y trouve de tout. Il est même possible de composer son panier zéro déchet à distance grâce au site internet et de le récupérer sur le parking, la place, le marché ou dans l’Amap de son choix.
Dans une démarche responsable, Tootopoids achète la majorité de ses produits aux producteurs locaux référencés auprès de l’Organisation professionnelle de l’agriculture biologique en Alsace (Opaba). On y trouve notamment des thés des Jardins de Gaïa, des farines et pâtes confectionnées en Alsace, mais aussi des savons L’Esperluète, une entreprise strasbourgeoise. Le calendrier des lieux de distribution est disponible en ligne. À savoir que le camion passe à Strasbourg tous les vendredis (sauf le premier du mois), à l’Amap Ma ferme bio à Cronenbourg.



Autres boutiques proposant du vrac, même partiellement, à Strasbourg et aux alentours : Les Petits Bocaux à Obernai, Biocoop quai des Halles et Vivre bio à Strasbourg, Biot Marché frais à Mittelhausbergen…
Un premier bilan ?
Faire ses courses en vrac nécessite un changement d’habitudes conséquent. Cependant, les efforts de sensibilisation des associations militantes comme ZDS (Zéro déchet Strasbourg) portent leurs fruits. Il ne s’agit pas ici de moraliser mais plutôt de montrer que d’autres modes de consommation existent, plus durables et plus respectueux de l’environnement. Tout est une question de balance, où le consommateur reste maître de ses choix.
Le résultat du “Défi zéro déchet” lancé en septembre 2017 par ZDS a montré que le modèle valait la peine d’être testé. Vingt familles se sont portées volontaires pendant un an et ont réussi à réduire leurs déchets de près de 36 % en moyenne, dont une famille ayant enregistré une baisse de 80 %. Réduire ses déchets demande des efforts et beaucoup de créativité, mais avec des outils comme les boutiques spécialisées, cela devient un peu plus facile.