Micro-brûlerie Mokxa
Barista* superstar
On le boit express ou rallongé, en filtre ou en capsule, en déca ou frappé, mais quel est donc ce grain vert qui éveille les sens et l’esprit ? Le temps d’un kawa, la rédaction vous emmène découvrir ou redécouvrir l’or noir dans un tour du monde frénétique. Des hauts plateaux brésiliens aux brûleries locales, des producteurs aux championnats du monde, c’est en compagnie de Julien Lee et Valérie Egele que nous partons découvrir le café !
*On appelle barista le “barman” qui confectionne et sert à la fois des expressos et des boissons alcoolisées. Le terme se galvaudant au fil du temps, il désigne plus largement les spécialistes dans la préparation du café et son traitement.

Au départ, des chèvres et de l’agitation divine.
Les origines du café remonteraient au IXe siècle, un berger éthiopien aurait constaté une certaine agitation dans son troupeau de chèvres après qu’elles aient mangé les feuilles et les baies d’un arbuste. Curieux et étonné, le berger s’empressa alors de porter quelques graines à un moine, qui en prépara une boisson. Exaltés par l’effet de ce breuvage, la légende voudrait que nos deux compères aient associé les effets du café à une puissance divine ! La boisson est immédiatement adoptée, consommée surtout par des moines afin de rester éveillés tard dans la nuit pour prier, et finit par se démocratiser au fil du temps. Restait à lui trouver un nom : historiquement, le mot café vient de l’arabe k’hawah (“revigorant”) mais certains assurent qu’il vient de son origine géographique, et du mot Kaffa, nom de la province d’Éthiopie où il a été découvert.
Des capsules, des filtres, un grain sous toutes ses formes.
Les habitudes des consommateurs de café semblent être en pleine évolution depuis l’arrivée de brûleries d’un genre nouveau. On y découvre d’énormes et étranges machines qui transforment et torréfient l’ancestrale baie verte de nos chèvres éthiopiennes en grains noirâtres. Nous avons donc poussé la porte de Mokxa pour y retrouver Julien et percer avec lui tous les mystères de la fabrication et de la préparation du café.
Arabica, Robusta, origines et importations, huit infos format expresso.
Le caféier produit des fruits rouges, violets, ou jaunes ; communément appelés cerises de café qui contiennent chacune deux noyaux c’est là que l’on trouve un grain de café. Nous consommons les grains issus des fruits de Coffea arabica, donnant un café fin et aromatique et les grains du Coffea canephora, robusta, plus riche en caféine. L’arabica pousse à une altitude comprise entre 900 et 2 000 mètres au-dessus du niveau de la mer et a besoin de températures comprises entre 15 et 24 °C. Les grains issus du fruit du Coffea Robusta contiennent environ deux fois plus de caféine que l’arabica. Les grains de robusta poussent généralement à des altitudes de 200 à 600 mètres et dans un climat chaud ( 24 à 29 °C).
Paul Morand, écrivain et académicien, écrira dans La Route des Indes “Par le thé, l’Orient pénètre dans les salons bourgeois : par le café, il pénètre les cerveaux”. En effet, les vertus du café ont longtemps été associées à la stimulation du génie mathématique du monde arabe. Ce n’est que vers 1650, soit 7 siècles après sa découverte, que le café fait son arrivée en Europe, plus précisément en Angleterre et il faudra attendre 200 ans pour que chaque ville d’Europe ait son café.
Jean-Sébastien Bach a composé une ode au café en 1732, ses vertus énergisantes et pharmaceutiques n’ont jamais échappé aux intellectuels, qui le buvaient au moment où ils devaient travailler et se concentrer, ou le consommaient pour calmer les migraines. Le premier café parisien : Café Procope, inventait en 1686 les prémisses du café filtre, le principe consistait à ” faire percoler de l’eau chaude dans le café retenu par un filtre”.
Du Brésil à la rue de Zurich, au fil du grain !
Pour en savoir plus sur ce fruit qui accompagne notre quotidien, retrouvons Julien Lee et Valérie Egele, respectivement barista et juge internationale lors des championnats du monde de café ! Cela se passe à Strasbourg, à Mokxa, pour remonter aux origines de la micro brûlerie, il faut remonter dans le temps, au mois de février 2014 avec l’ouverture du café Bretelles (2 rue Fritz, 67 000 Strasbourg). Au départ, la clientèle était davantage étrangère. Et oui, malgré ce que l’on pourrait croire, les pays latins étaient en retard concernant la préparation et la quête du goût dans le café. En France, l’habitude est à l’expresso ou au rallongé, au café en capsule ou en poudre, il accompagne les repas et les terrasses, il est rarement considéré comme un produit dont on cherche l’origine, dont on a des attentes particulières, dont on perce les mystères. Alors le café servi est parfois perçu comme trop amer, trop acide.
Grâce au travail de nombreuses brûleries, à une cuillère à café de pédagogie et à Georges Clooney, les mentalités ont évolué et les goûts ont suivi. Désormais, le café est devenu un produit que l’on savoure, que l’on prépare soigneusement et que l’on traite avec délicatesse dans les brûleries. C’est le cas notamment de Mokxa, antenne strasbourgeoise du torréfacteur lyonnais, qui a ouvert ses portes en 2015 et qui divise ses activités en 3 secteurs : la torréfaction, la formation, la dégustation.
Concernant la torréfaction, c’est aux côtés de Julien, issu du monde de la brasserie et des coffee shop que nous découvrons le procédé de traitement du grain vert. Ces grains, c’est au Brésil qu’il est allé les chercher, au plus près des producteurs, pour s’assurer de la qualité du produit, mais aussi pour y découvrir les plateaux et paysages gigantesques qui donnent vie à ses cerises. Et c’est dans d’immenses sacs de jute qu’arrive le grain qui passe entre ses mains pour être torréfié.
Le procédé de torréfaction
- Les grains verts sont déposés à l’intérieur du torréfacteur. Celui-ci est constitué d’un tambour monté à température. Il est en constante rotation, afin d’éviter que les grains ne brûlent durant l’opération.
- La cuisson du grain vert démarre lorsque le torréfacteur est amené à environ 200°C. L’évaporation de l’eau fait alors craquer le grain (ce procédé dure entre 10 et 15 minutes).
- Le grain change de couleur et perd 15 à 20 % de son poids en augmentant son volume de moitié. Julien s’assure de la bonne gestion des températures sur son ordinateur. Passant du vert au blanc, puis au jaune clair, le grain ressort finalement dans sa couleur…café.
Mokxa torréfacteur de cafés fins
Mokxa Strasbourg produit environ 150 kilogrammes de café par semaine, livrés ensuite dans les commerces partenaires par paquets de 5 kilogrammes. Il s’agit pour cette équipe non seulement de produire un café de qualité, respectueux des valeurs environnementales et des labels, mais aussi de proposer différents dispositifs pédagogiques autour du café. On peut notamment assister à des séances de dégustation, dans la brûlerie ou dans l’un des établissements du café Bretelles.
Mokxa travaille également avec de nombreux restaurateurs qui ont la volonté de donner plus de place à ce produit. Les différentes étapes de traitement du grain vert depuis sa sélection jusqu’à la préparation, doivent respecter une succession d’étapes codées et répertoriées. Grain, température de l’eau, poids, temps de filtrage, préparation du lait… c’est tout un art de faire un vrai café, et cet art est aussi une discipline, qui donne lieu à une compétition internationale. Les Championnats du monde de café !



On quitte provisoirement Strasbourg pour partir avec Valérie aux championnats du monde de café. Forte de ses 12 années d’expérience dans les championnats internationaux, elle nous dévoile les secrets de cette compétition étonnante, qui se déroule sur trois jours. Pour prétendre au poste de juge international, Valérie a d’abord passé des tests en France.
Le règlement exige en effet que l’on ait été juge sur le plan national à deux reprises pour pouvoir postuler au rang de juge international. Elle a passé ensuite une succession d’épreuves orales, mais aussi techniques avant d’être adoubée. Ces épreuves se rapprochent bien entendu de celles qu’elle juge désormais lors des World of Coffee.
“Les concurrents s’entraînent au quotidien” Pour obtenir le très convoité titre de meilleur barista du monde ! 61 compétiteurs représentant leurs pays respectifs s’affrontent pour appartenir au cercle très serré des 6 finalistes et prétendants au titre. Pour ce faire, ils s’entraînent au quotidien, répétant les mêmes gestes inlassablement.
Le déroulement du World Barista Championship
15 minutes et 3 catégories de boissons !
- Expresso : d’une contenance de 20-30 ml, couvert d’un crema noisette foncée, élastique et dense, tout en concentrant les arômes que doit retrouver le jury. On doit ici retrouver l’essence même du café, des paramètres comme l’eau ou la température utilisées doivent être parfaitement maîtrisés.
- Boisson lactée: il s’agit ici de trouver un équilibre subtile entre les saveurs de l’expresso et celles du lait.
- Boisson signature : faisant appel à l’inventivité des baristas, cette épreuve consiste à proposer un cocktail original composé d’expresso et d’ingrédients choisis par le concurrent.
Valérie est optimiste en ce qui concerne l’avenir du café, notamment grâce à l’intérêt de grands groupes comme Nespresso, qui, selon elle, ont participé à faire du café un produit dont l’image a gagné en notoriété. Malgré l’investissement de ces grands groupes, elle regrette que les jurés des compétitions internationales doivent payer de leur poche la présence aux compétitions. Déplacements, hébergement, nourriture, tout sera encore une fois à la charge de Valérie lors des prochains World Of Coffee d’Amsterdam. Au fil de la compétition, les quatre juges sensoriels sont en charge de la dégustation et de l’évaluation selon les règles internationales, tandis que deux juges techniques observent la gestuelle, la maîtrise des équipements et le bon traitement du café et du lait afin de juger du professionnalisme et de la qualité de service du candidat. Un travail d’orfèvre autour du goût, de la quête du geste parfait, pour une compétition de quelques minutes seulement, mais non moins déterminante pour les candidats ou leurs sponsors.
Valérie nous confie que la compétition évolue à son rythme, certains candidats pourraient être plus ou moins défavorisés selon le degré d’appui financier de leur “sponsor”. Les compétitions se déroulant sur des machines spécifiques, les candidats ayant eu la chance de s’entraîner sur celles-ci seraient favorisés. Le World of Coffee se déroulera cette année du 21 au 23 juin 2018 à Amsterdam.
Avant la compétition, passez par la découverte.
Si vous êtes encore loin d’avoir les connaissances nécessaires pour déceler toutes les subtilités de cet or noir, sachez que Mokxa vous accueille une fois par mois pour vous proposer des ateliers de dégustation, des formations, ou du consulting. En effet, depuis 4 ans Mokxa propose des ateliers pédagogiques pour des groupes de 3 ou 4 personnes souhaitant en savoir un peu plus sur ce qu’ils mettent au fond de leur tasse. Des formations personnalisées et pour tous niveaux proposent des éléments de connaissance aux amateurs de café comme aux professionnels de la restauration.
Vous pouvez aussi opter pour l’atelier cupping, une rencontre initiatique qui chamboulera votre palais et bousculera vos habitudes. Au programme “un travail sur les odeurs, les arômes, la persistance et la texture” qui s’accompagne de dégustation, d’histoires autour des secrets de la botanique, de l’expérience et l’expertise des baristas. Une plaisir instructif pour seulement 18 €, à Strasbourg ainsi qu’à Lyon, qui vous permet de découvrir cet univers rempli d’odeurs et de convivialité. L’occasion de voir les étapes de traitement et de préparation de cette boisson qui gagne à être connue, le tout préparé par des mains expertes, et l’occasion d’échanger, comme au café autour d’un café !
Mokxa
2 cours du Brochet
67000 Strasbourg